Sujet tabou, la menstruation affecte l’éducation de nombreuses filles au Mali. Pour briser le silence, le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) et ses partenaires, ont organisé le 18 juin 2021, une journée de sensibilisation sur l’hygiène menstruelle à Sincina, dans le cadre de la célébration de la journée mondiale dédiée à la bonne gestion des menstrues.
Briser les tabous et changer les normes sociales négatives. C’est le leitmotiv de la journée mondiale de l’hygiène menstruelle, célébrée le 18 juin, à Sincina, sous le thème : « Plus d’actions et d’investissement pour la santé et l’hygiène menstruelle ! ». Sincina est une commune rurale, située à une dizaine de kilogrammètres de la ville de Koutiala, au sud du Mali. L’évènement a rassemblé les autorités administratives, coutumières, partenaires de l’école au niveau local et national et d’autres notabilités de la commune.
Depuis 2014, le Mali commémore la journée mondiale de l’hygiène menstruelle. Mais la délocalisation de l’évènement est une grande première. Et pour cause ? La question de l’hygiène menstruelle est taboue et impacte beaucoup l’éducation des jeunes filles dans les zones reculées.
Manque d’infrastructures adaptées à l’hygiène intime
La menstruation est un phénomène physiologique normal, selon les spécialistes. Cependant, pour des nombreuses filles et adolescentes au Mali, les règles sont synonymes de troubles psychologiques, d’absentéisme et d’abandon scolaires. Puisque la plupart d’entre elles vivent leur première expérience, sans avoir la moindre information sur l’hygiène intime. Et les établissements scolaires ne disposent-ils pas d’infrastructures adaptées à la gestion de l’hygiène intime.
Une étude réalisée en 2019 sur l’hygiène menstruelle dans les cercles de Bandiagara et Koutiala, révèle que 90% des adolescentes ne changeaient pas leurs serviettes hygiéniques à l’école pendant les menstruations. « Une attitude susceptible de provoque des risques d’infections, d’inconfort et de manque de concentration », analyse Dr Amah Klutse, chef du bureau Eau, Assainissement et Hygiène à l’Unicef Mali.


« Seulement 16% des écoles du Mali disposent de latrines améliorées, séparées filles/garçons »
La même étude estime que 20% des filles du cercle de Bandiagara ont affirmé avoir manqué un cours à l’occasion des menstrues, soit à cause de la douleur ou pour des besoins de rechange de leurs serviettes hygiéniques. « Le faible accès aux infrastructures d’eau et d’assainissement explique en partie cet absentéisme des filles car seulement 16% des écoles du Mali disposent de latrines améliorées, séparées filles/garçons, fonctionnelles et 51% de ces écoles ont un point d’eau amélioré nécessaire à la bonne gestion de l’hygiène menstruelle », évalue le manager de WASH-Fonds des Nations unies pour l’enfance.
Absence de cadre d’échange
Le groupe scolaire de Sincina fait partie des rares établissements scolaires disposant de toilettes améliorées. L’école dispose de « 45 latrines pour un total de 2 427 élèves dont 47,24% de filles. Toutefois ces latrines ne disposent pas d’options spécifiques pour assurer l’élimination des matériels utilisés pour la gestion des menstruations », affirme Siaka Coulibaly, le maire de la commune rurale de Sincina.
L’autre défi selon les acteurs locaux de l’éducation, c’est l’absence de cadre d’échange sur la problématique de la menstruation à l’école et dans les familles. Ce qui rend difficile la gestion de l’hygiène menstruelle.
Défis liés à l’éducation des filles
C’est pour inverser cette tendance que le fonds des Nations unies pour l’enfance, en partenariat avec le ministère de l’Education nationale du Mali et les autorités scolaires et administratives de la région de Koutiala, a initié cette journée de sensibilisation et d’information sur l’hygiène menstruelle. Elle vise à lever le voile sur le sujet et engager les décideurs en vue d’une meilleure gestion des menstrues à l’école et au sein des communautés. Ce, grâce à des informations fiables et des produits et infrastructures adaptés. « La santé et l’hygiène menstruelle ne devraient pas ajouter un poids supplémentaire à tous les défis auxquels font face les filles dans la réalisation de leur droit à l’éducation », estime le représentant de l’Unicef.


Cette activité s’inscrit dans le cadre du Projet d’appui à l’inclusion sociale(PAIS), financé par l’Union européenne. 75 écoles, dont le groupe scolaire de Sincina, ont été équipées en infrastructures d’eau, d’hygiène et d’assainissement. Tan dis que 100 000 enfants ont vu leur scolarisation renforcer grâce au projet. Aussi, 72 000 kits de gestion de l’hygiène menstruelle ont été distribués au profit des adolescentes qui amorcent leur puberté dans les régions de Koulikoro et Sikasso, principales zones d’intervention du programme.